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mercredi 12 décembre 2012

Sarazonie

Michel Valprémy



Inédit, octobre 1983

lundi 5 novembre 2012

M'as-tu abandonné ?

Michel Valprémy




Inédit, octobre 1983

mardi 10 juillet 2012

Femme, Fissure

Michel Valprémy





Inédits

dimanche 8 juillet 2012

Les hectares du corps (inédit)

Michel Valprémy


A Suzanne et Albert T.



DECEMBRE 82



Quel chant pour la faucielle plus
loin que le solstice ?


CADASTRE

tes reins creusent d'Automne l'idée aux labours une géante (forme loin des haies) te promet

piquets craquent chair plate boue glacée ton regard et personne proche l'Hiver hâte tes sèves

dru si vite ce champ un Printemps bas-relief vert houleux et l'invite en fusion

l'Eté variété du pain femme mûre récoltée elle plus que naître



Le champ (cadastre dans la valise noire) glisse sous la porte des bureaux.
Expose, explique, développe, décortique ! tu ne peux pas inventer les chiffres. Tu te rends poreux, écoute régulière, ordre des registres» Va blanchir ta nuit, je te souffle !



JANVIER 83
(premières photographies aériennes)



diapositives (un seul regard devant l'ampoule) champ nu brouillard granité sur la terre



un ventre sans cloison (l'opulente promesse)

ta légende et le songe aux circuits de notre œil

quel vent quel sable quelle tourbe effaceront — fard coulant sous le spot direct — l'image millénaire

un tracé de première cellule

— les continents y convergent —

oiseau bordé de blanc que l'avion en réplique imprime



La poignée de la valise noire se disloque. Le rêve pèse. On l'alourdit (photocopies, dossiers, trombones, agrafes, signatures d'encre épaisse). Une à une tu retires en vain les -pi-punaises. On a fiché l'imaginaire»




FEVRIER 83



II pleut. Le géomètre est retardé. Le paysan observe le soleil couchant, le vol des oiseaux, énonce la liste des proverbes météorologiques. Dans nos chambres ("Fusion" avant creuset) nous fixons l'espoir, t'interdisons les justifications. Qui, à la table des réunions budgétaires, lui refuse la moyenne ? Ils ont enlevé la fève de sa part de brioche. Il faut toujours prouver avant d'obtenir les moyens de prouver.


Il souhaite que la concrétisation de ses fantasmes soit communicable à tous. Il le croit. Il ne fera pas de concessions.
Mais.
On ne s'amuse pas avec la terre, la récolte. On ne gaspille pas le pain. L'Original ne gagne pas sa vie. Il se couche parfois à midi l'aube, dort encore à midi.



MARS 83



dans l'orbe satellite le champ poussière, granule, ocelle, papille. A terre figure de proue d'une province (les foules masquées viendront au port).



Abstraction rythmée du corps

Un caillou blanchi, note primaire sur partition serrée, rature claire dans la strophe

Quelques pas d'hommes, technicien de visée

(dés)ordre du décor et du galbe

Graines closes sous le sillon arable (vapeurs au coït du rayon)

le ver hermaphrodite attend son heure



AVRIL 83



Dans la nuit des germinations le chemin de l'étoile est un lit renversé

II dit : "Le champ végète." (double sens des soupirs)



MAI 83



Bordeaux. Parc des Expositions.
Le corps en miniature pourrit, enclos
pour un blanc sarcophage.



LE CORPS STERILE


Le jardinier frappe à sa porte, ôte sa casquette. Il se gratte la tempe droite, de ses doigts tombent des fragments de boue séchée. Elle n'est pas surprise. Depuis le jour des Cendres, le jardinier travaille au fond du potager. Elle l'épie, juchée sur la murette, à demi cachée par le noisetier. Elle lui jette des silex, des lichens, des brindilles épineuses, des crottes de chèvre. Parfois le jardinier sourit.


Elle décroche le loquet, entrouvre son peignoir, appuie ses paumes sur le chambranle de la porte et, au plus vite, laisse le jardinier entrer en elle. Leurs lèvres ne se touchent pas, à plusieurs reprises les fronts se cognent. Ensuite elle lui offre du vin, du pain, de l'ail, refuse un bouquet de crocus et de primevères. Il ne doit pas franchir le seuil de sa maison.


Elle se couche sur la terre fraîchement retournée. Elle veut être mère. Elle regarde le ciel net mais repousse le rêve. Elle regarde le ciel net sans obstination. Elle écoute les pulsations de son ventre, bruits de source, de caniveau, de chasse d'eau, de fleuve fou.


Un nuage oblong, ocre, partage le ciel. Soudain son ventre se tait. Elle tremble doucement. L’intérieur de son corps se résorbe, semble s'évaporer. Sa tête se rétrécit, la jambe gauche s'étire jusque dans la haie de bordure. Il pleuvra bientôt, elle ne distingue plus qu'un mince croissant de bleu. Elle ne peut plus se soulever. Elle attendra son enfant ici, un siècle s'il le faut.


Le jardinier a brisé le manche de sa bêche, les dents du râteau. Il part vers une ville inconnue. Il ne peut rien emporter.
Il pleut depuis quarante jours. Il pleut encore. Elle ne sera jamais mère. De son corps il ne reste qu'un contour distinct. Puis l'herbe efface tout.


Le jardinier a changé de casquette. Il y a quelques lettres dorées cousues sur la visière.



JUIN 83



Un boisseau de blé, quelques signes de notre culture traverseraient les mers, les grands massifs. Utopie en regard de l'acuité des combats politiques et sociaux, en regard des questions de survie ? Offrir certes, que le don ne soit pas dérision, insolence, satisfaction du privilégié.



JUILLET 83



Le monde rural, les associations culturelles et sportives, toutes les ramifications prévues et imprévues participeront au projet initial sans le déborder, sans en détourner l'évolution.
La genèse de la "Femme de blé" n'appartient qu'à lui. Il le sait même s'il ne le dit pas, ne le dit plus. Nous autres, proches ou confidents, nous ne sommes que pièces rapportées, parfois, au meilleur, arcs-boutants. Nous l'avons admis ainsi, dès le départ. Il doit aussi réussir contre nous, conte nos mises en garde, nos atermoiements, nos silences. Nous nous situons souvent en retrait de ses espoirs.



AOUT 83
(Marsaneix)



… déesse de la fécondité. On a régressé vers un inonde irrémédiablement perdu, une fiction tribale. 

Le cortège païen, promenade des fous, se dépouille sur le parvis. L’église abrite le pain sculpté.

" L’Artiste " disent les moissonneurs.



SEPTEMBRE 83



FEMME DE BLE

il s'agit toujours d'une femme d'une femme entre toutes les femmes d'une mère entre toutes les mères d'une fille aux yeux d'amante d'une amante d'une mère

il s'agit toujours de la vie de la vie d'une fille fille verte et claire et brune d'une amante du ciel et de la terre de la vie d'une graine de la terre de la vie de l'eau et du ciel de la vie d'une sève de la vie d'une mère

il s'agit toujours de la mort de la mort d'une fille amante et mère de la mort d'une sève fructueuse de la mort d'une sève épuisée

il s'agit toujours de la naissance de la naissance d'une fille fille de l'amante fille de la mère fille jumelle de la fille fille du ciel et de la terre

il s'agit toujours d'une femme toujours de la vie et de la mort de la naissance toujours d'une femme


Inédit (Ecrits pour Thomasson)


vendredi 6 juillet 2012

Successif Simultané Le moment

Michel Valprémy




Interventions à Haute Voix, n°15, octobre 1983

mardi 22 mai 2012

Il faut en finir avec les définitions

Michel Valprémy



"….anfractuosité de nos dits, sapes névralgiques du doute...Que d'abus (et gémir) sur le sang de l'encre! Un manuscrit tavelé (douceur poivrée de la sueur) pâlit sous le rayon mobile d'une treille, grimace dérisoire en regard des fusils, de l'électrique, des fléaux spatiaux..."

Emblèmes évidés



Il faut en finir avec les définitions péremptoires : la poésie n'est que ceci, la poésie n'est pas cela, la poésie est autre "chose" que l'autre poésie. N'y allons pas de nos fiches, des classements arbitraires ! Pourquoi la poésie commencerait-elle par se dénoncer elle-même, ce qui est aussi néfaste que l'adulation de caste ? Méfions nous de la poésie segmentée, de cette position figée, timorée du juste milieu "entre réalité et mensonge". 

Comment peut-on affirmer que le poète " voit la lumière, seulement la lumière, quand des forces obscures le tenaillent ? Il voit la lumière et l'obscurité. Et. Et la grisaille et toutes les irisations. Il boit la liqueur des alambics et la vinasse des auberges. Il écrit dans des chambres austères, des bibliothèques i1 écrit sur les murs (tracts et affiches), dans des grimoires, des laboratoires. 

Pourquoi la poésie serait-elle seulement clamée ? murmurée, susurrée, chuchotée, lue, ignorée, oubliée, retrouvée, transmise de bouche à oreille, de paume en paume balbutiée, chantée et clamée. Et clamée. Et. Elle ne revêt pas que la couleur du sang, elle couche dans des terriers et dans la soie, sous les lambris stylés, dans les linceuls blets. Elle se montre visage nu, emprunte les masques de Venise, de l'Orient, de 1'Afrique. Elle visite la cour des fermes, la cour d'amour, les salons des châteaux occupe les landes en friches, les champs de bataille, fleurit au jardin de Monet. Occise ou bâillonnée dans les prisons, elle souffle avec le grand large. 

Elle est le rien et son envers.


Cassiopée ou l'Envers du Rien n°3, décembre 1983

vendredi 18 mai 2012

Femme de blé

Michel Valprémy



I1 s'agit toujours d'une femme d'une femme entre toutes les femmes d'une mère entre toutes les mères d'une fille aux yeux d'amante d'une amante d'une mère


il s'agit toujours de la vie de la vie d'une fille fille verte et claire et brune d'une amante du ciel et de la terre de la vie d'une graine de la terre de la vie de l'eau et du ciel de la vie d'une sève de la vie d'une mère


il s'agit toujours de la mort de la mort d'une fille amante et mère de la mort d'une sève fructueuse de la mort d'une sève épuisée


il s'agit toujours de la naissance de la naissance d'une fille fille de l'amante fille de la mère fille jumelle de la fille fille du ciel et de la terre


il s'agit toujours d'une femme toujours de la vie de la mort de la naissance toujours d'une femme


Exposition Thomasson à Trélissac, "L'Algérie", mai 1983

dimanche 13 mai 2012

Devoir de vacances (inédit, 1983)

Michel Valprémy

                                                                            L'Ormeau le I Juillet,                            


Monsieur,


Ce matin, au réveil, le soleil caressait mon lit. J'ai repoussé le drap pour mieux goûter la chaleur des rayons sur mes cuisses nues. Mon grand polo bleu (celui que vous aimez, vous me l'avez dit la seule fois que vous m'avez abordé; je ne me souviens pas d'une autre phrase ni de votre main dans la mienne, de votre paume sur mon épaule), mon grand polo bleu se soulevait à hauteur de mon ventre et je pensais à vous. Je contractais mes muscles périnéaux (j'aime cet adjectif, je l'ai appris récemment), le polo se tendait, se plissait comme le ciel ou la mer d'une affiche publicitaire. J’ai fait l'endormi, mes parents se préparaient pour la messe. Après leur départ je me suis levé et, sur la glace de l'armoire, j'ai écrit votre nom avec un morceau de savon. Je sais où vous habitez, je vous ai suivi hier jusqu'à votre porte Monsieur le Juge (j'ai lu votre plaque bien astiquée).Vous aviez l'air triste, votre cou paraissait si court soudain que je ne distinguais plus vos cheveux gris entre le revers de votre veste et ce chapeau un peu ridicule qui ne vous quitte jamais. J’avais envie de vous tenir le bras pour vous aider à monter les marches de votre perron, mais j'ai ramassé un fragment de tuile pour le jeter dans votre direction. Aujourd’hui je regrette de vous avoir manqué.
Cela fait presque trois mois (les marronniers étaient drus) que chaque vendredi après-midi, à quatre heures, vous attendez assis sur le banc du square lisant votre journal. Hier donc, le dernier jour de l'année scolaire, pour vous, je portais mon polo bleu, j'avais aussi emporté mon peigne, j'ai attendu que toute la classe sorte pour me recoiffer, lisser ma mèche. Quand je suis passé devant le banc, comme à votre habitude vous n'avez pas détaché le regard de votre journal. Je me dirigeai vers la rivière (dépassant le coin des baignades) jusqu'au Pont des 4 Chemins. Je me retournai plusieurs fois, je savais que vous marchiez derrière moi. Je ralentissais le pas, cueillais des fleurs que je mâchonnais quand vous vous arrêtiez pour parler à quelqu'un. Vous en connaissez du monde Monsieur le Juge ! Cette promenade dura longtemps, une heure peut-être. Je redoutais l'apparition d'une brume, la montée imprévue d'un orage. Je me suis dévêtu près de l'ancien lavoir déserté depuis longtemps et, en maillot de bain, je m'étendis en pleine lumière. J'ai fermé les yeux jusqu'à 1a première ombre..Vous étiez toujours là, votre chapeau flottant au-dessus des joncs. Mon cœur tapait si fort que je croyais entendre trembler la terre. Alors, sans me redresser j'ai ôté mon maillot, ouvert les jambes dans votre direction et rabattu mes genoux sur mes épaules. J’avais peur mais j'étais sûr de vous faire plaisir. Vous êtes parti brusquement. Rhabillé en toute hâte je vous ai suivie…
Vous ne me croirez sans doute pas mais j'aurais pu tout aussi bien me jeter dans la rivière pour y mourir. Ce n'était pas la honte qui me poussait ni la vengeance, non, mais la déception qui "vous" obsède après un pacte inabouti, une promesse brisée.
Voilà, je crache sur le miroir, efface votre nom. Ce soir je prends le train pour les vacances annuelles au bord de l'océan. A la rentrée je ne retournerai pas au lycée et le square n'existera plus. Je vais glisser moi-même cette lettre dans votre boite, j'espère que vous serez le premier à la lire. Adieu.

P.S. Ci-joint un morceau de mon polo bleu. Je vais le brûler à l'instant 

vendredi 11 mai 2012

Comment dire vivre !

Michel Valprémy


Toute une ère tranquille. Se repose depuis des mois sous un ciel laiteux et le ciel est partout. Se déplace à peine (quelques siestes pour mieux dormir) dans une sphère d’ombres silencieuses, cerné sans contrainte d’une végétation aqueuse (décor de voiles, de cellophane). Oscille, se balance. Rêve beaucoup, sans images, sans histoire. N’a jamais faim ni soif, non jamais. A l’impression d’être comblé, pourvu de tout, malgré lui comme si, au-dessus ou plus loin peut être, une force invisible, inaccessible le portait. Ni paroles ni musiques ou très assourdies – tambours distants. Personne. Sait qu’il est bien, se le répète. Ne désire rien d’autre que cette latence oisive, indolore. Parfois une pression légère l’oblige avec une ferme douceur à replier ses membres, à dodeliner de la tête, à se renverser. Pourtant se révolte et s’agite mais après quelques soubresauts, un réflexe, s’immobilise à nouveau dans le sommeil. Ni air ni souffle, un climat tempéré en toutes saisons immobiles. 

Puis, sans raison, sait qu’il doit se lever, se séparer de ce temps sans heures, sans comptes où il ne vieillit pas. Des haut-le-cœur aigrissent sa léthargie, vacille, s’accroche aux lambeaux des arbres qui s’agitent et le giflent. Cataclysme, typhon, raz de marée. Arraché de sa couche la peau distendue comme élastique usé. Bave, se débat, souffre, veut appeler (prier peut-être) mais sa gorge reste muette. Un torrent d’eaux glauques le roule, l’emporte. Ne résiste plus. Est aspiré par un cyclone glacé. Croit ses ongles brisés. Saisit un cordage muqueux qui l’encercle et l’étouffe. 

Il pleut 

Dans un tunnel suintant, étroit, sans la moindre clarté, n’ose avancer. Les parois de lichens et de marnes molles le font déraper. Tombe et sa peau s’écorche. Du sang chargé de fièvres embue ses yeux. N’ouvre plus ses paupières et commence de regretter son hamac, son enclos. Où se consoler ? Peur. Résiste au lent glissement. Rien qu’un déplacement imperceptible. Se décide à voir. Soudain, perçoit une lumière blanche. Veut y aller, gesticule comme ver. 

Au bord de la grotte une main de géant, sans corps, le tire l’arrache, lui défonce le crâne. 

Il crie !


Cassiopée ou l'Envers du Rien, n°1, avril 1983

samedi 5 mai 2012

Cellule

Michel Valprémy



Non le ciel n'est pas attristé son calme se brise d'oiseaux marins                         barreaux de tristes ratures on crie parfois dans les couloirs (la peur électrique) sur le plâtre trempé on a tracé ongles usés des signes brefs — pas même le loisir de l'obscénité — et le destin trop défini n'a plus de chances (couperet-salve-alcool/mégot) on calculait jadis les correspondances foison triée des repères                 il chante une dernière portée quel registre secret d'un monde inversé nous la révélera fossile ?

Cassiopée ou l'Envers du Rien n°2, septembre 1983

mardi 6 mars 2012

3 Mélodies

Michel Valprémy


à André Caldéron



1. 19 heures 33

Haut sur le néon d'un bowling les enseignes de bière pancartes et locations la lumière gît tu vois ces lanières huilées d'or il fait frais à la ceinture soudain d'or primitif oui comme ça entre café et réglisse dans l'odeur saltimbanque des moteurs ce regard supérieur sous une boue bleue le cœur détraqué nuit de pétrole mais mais si j'ai cent balles


2. Impasse floue

Un guet de songe le profil pâle et poreux la bouche si rouge comme baie éclatée suintent les poussières lentes de pluie trop de cheminées coupables tout perdu risques et envols on n'y voit rien sur la vitre non c'est moi qui


3. David

L'épaule de cuir cogne le mur d'un rythme qu'il ne fredonne pas il mâche hollywood je l'épingle œil fermé et manque l'heure des bus il sera cruel une fronde de cahiers neufs déhanché dans la toile de Nîmes trop mat pour l'automne il crache la gomme verte pour moi géant défait de sa bouche coin plissé


I/II/1979

Publié dans Cassiopée ou L'Envers du Rien, n°2, 1983

dimanche 12 juin 2011

Le Petit laboratoire de Mister H. (extraits)

Michel Valprémy

Mister.H cède à son vice :
Bric à brac, anguille sous roche pois de senteur formol à la pelle miroirs désargentés pistaches à foison ribambelle d’insultes pommettes du dernier émoi une poignée de main cardinale ½ litre de sperme (traites jour à nuit) 2 dimanche avec une mousson de pensées (fleur ou non) un coït sans pommade une pipe à eau garnie (voyez ce que je veux dire) un précis d’articulation avec en première page chichi-castenango et en deuxième rataragama une pincée de sel glacé un chien sans fusil un permis de se déconduire un lèche-cul portatif sourires cataplasme effigies des serpents-cocus à clochettes un pygmée toujours à la bonne hauteur (voyez ce que je veux dire) un dictionnaire vierge de nombreuse absences (on perdit hier la mémoire) un sanglot long quelques incertitudes des concordances atténuantes des retours à l’envoyeur
(…)
 
Moi
Oh les bajoues des mémères ces ruchers de plis gras et la semoule baveuse accumulée aux commissures des lèvres le pépé mouillant sa chique coincée entre deux caries plus tu bouffes plus tu chies t’as vu t’as vu çuici la moustache trempée de vin même le vermicelle on dirait qu’ils le font exprès
moi aussi je les aime aussi comme ça
et moi
Si on comptait les âges différemment (son propre vécu) j’aurais 4 ans et demi moi je remonte carrément aux sources : les couilles de mon père
je disais les adolescents d’Arabie menthent
Un anneau d’or m’attache encore je ne serai jamais tout à fait pèlerin
(…)
 
enfin tu y viens tu lèves l’embargo et aspires avec nous (ça te va bien le rire) sous le pull rouge je culbuterais bien ta peau et poisserais ce ventre tout petit bouda bien mieux que le baiser furtif des fidèles
je ne suis pas ton tire botte de toute façon j’ai perdu la main
paroles de vieil homme ses légendes cutanées même l’incision du pêcheur
euthanasie des plus vieux radars toutes les anfractuosités du silence à picorer ces graines du dernier don (génuflexion pour quémander ton sexe en aumône) je m’enlarve et m’essouffle – fleurs crépues dans les poumons

LPDA n°41, janvier 1985 (extrait 1) ; L'Envers du Rien n°01, avril 1983 (extraits 2 et 3)















dimanche 20 février 2011

… qui danse

Michel Valprémy

Khoreia I
--> 1.2.3- (répété) Girouettes. Nord. Sud.
--> Il a dit "diagonale". On se vengera aux 4 vents, sans pancarte, alibi ou miroir. On m'aura fait promesse, après les fards, la cage ronde des spots : "Tu TE danseras !"
Khoreia 2
Dans la rigueur exercée (poses et variantes) un remous
du jardin fœtal (on le suppose) et pour bond, Pégase.
nuit coule sur la paume serrant la barre (quelle source impure ? paroles de profane) corps fibres de l'âme suintent après bravi IL crie une fin (hors des hiérarchies arbitraires) le double l'autre échappés perdus à peine montrés le saut le geste le plus rare n'atteignent que l'éphémère et souvent l'œil grimace de qui ne sait pas TRAVAILLE ! tu mourras jeune qui danse connaît ce vertige bref libre plus haut que la permission du poids plus élastique que le tendon le plus souple gravite derviche plus grand plus difforme plus bel plus vicié que l'image libre libre du sol et des codes
Crucifixion
C'est fini ! dernier projecteur. L'ombre est régulière,
le plateau nu. Jusqu'à demain ? toujours ? Une fois
encore la sueur, l'essai S.V.P. Non, la peau humide
pend, le miroir a rendu les rides.
Il fait vieux partout.

Les dossier d’Aquitaine n°05, 4e trimestre 1983












dimanche 10 octobre 2010

Un masque, un miroir

Michel Valprémy
à Pierre Cottreau
Ce sera, Le dernier jour. Tu ne te feras pas prier. Je te mettrai un bandeau noir quand ton œil commencera ses rires. Je te conduirai par La manche. Les pieds nus sur ce chemin où vivent Les serpents, Les tarentules et Les scorpions. J'aurai lié tes mains avec un fil d'argent, je ne te délivrerai qu'à l'heure fragile des Lucioles. Je découperai ta camisole bleue, te coucherai sur le tertre des fourmis mauves, elles glisseront Leurs œufs marbrés dans tes oreilles, tes narines, ton méat, ton cul. Tu m'appelleras. J'ouvrirai tes lèvres avec la ronce et boirai le petit sang. Tu diras : "encore". J'enduirai ton corps de miel pour L'œuvre râpeuse des mandibules. Tu plisseras ton front et tu gémiras en accord. Quand La lune prendra la couleur du liège je m'allongerai sur toi. Les coccinelles, les doryphores, deux ou trois grillons, un ver de terre repu déserteront ton sexe. Je m'empalerai en te montrant ma nuque où le sculpteur sérieux gravera une vulve aquatique. On ne dira rien. Tu verras des images de rasoirs, de viande tailladée, d'obélisques géants, de sucre d'orge aminci par la langue cachou Je t'interdirai de jouir et me décrocherai pour laisser le premier vent du matin t'accomplir. Je te couvrirai de terre et de luzerne, raserai tes cheveux (ou je ferai semblant) et, quand midi sonnera, sous la loupe je chaufferai tes tempes. Puis, avec le scalpel dérobé, je scierai mes poignets et lentement, sur le fumier sec j'attendrai de pourrir.
Quand tu t’éveilleras treize ans auront passé. Tu n'auras plus de chambre à toi mais, parfois, une fenêtre. Tu déplieras une Lettre, les mots seront presque effacés, quelque chose comme : "salut ... grenadine ... oiseaux turbulents ... corps poreux ... pas même souffrir ... "Tu ne souriras pas, tu ne pleureras pas. On frappera au carreau. Tu prépareras le bandeau.

Interventions à haute voix n°08, 30 septembre 1983

dimanche 7 mars 2010

Alibis

Michel Valprémy

toutes ces prières aux secondes de tourbe mais sincères dans le feu (à peine l’instant épinglé) avec les vertus du prie-dieu des carpettes des nuits d’édredon et sans imaginer la peinture météo (métronome à la ceinture) des catéchumènes célestes on s’exile un peu moins bas et c’est bien       personnel
séduction perméable au silence cet étrange mirage de reconnaissance on y croise des masques et l’harmonie haussée mais sous l’étoffe fœtale (ou dans le pli du mur) on compte la vermine les pourritures et la peau hante       molle

Cassiopée n°1, avril 1983

dimanche 15 novembre 2009

Agrafe

Michel Valprémy


AGRAFE 1
Tu t’es retiré J’ai vu ta coquille Il pleut
Sous la plume l’huile Ton absence bave je découpe la page vierge la froisse la mouille de ma sueur la mâche l’avale rien ne me nourrit je crache des syllabes glaireuse des sons jamais écrits (unique, le croire)
La bouche caresse ton œil je ne sais pas si l’aube viendra dans ma tête roulent des fiacres un vieillard a brisé sa canne
AGRAFE 2
l’ombre passe sur les clochers les oiseaux perdent leurs plumes la fermière a déchiré son tablier j’ouvre la porte sur des injures molles un rasoir coupe ma tempe personne n’est venu
AGRAFE 3
la petite épingle dorée perce ma peau à l’intersection du cou et de l’épaule (le foulard sans cesse plissait) je ne dis rien je crois que tu le fais exprès tu souris le soir je déchire la soie au matin je ne parle plus
AGRAFE 4
quand il plia contre elle la fibule du corsage lui coupa le front ils firent l’amour dans le sang la femme de chambre ricana en changeant les draps sous le lit une araignée énorme rouge chantait comme un grillon
AGRAFE 5
ferme les yeux ! tu as placé un tison sur ma langue et je l’ai roulé comme réglisse douceur acidulée ton meilleur baiser
AGRAFE 6
Juste après le fouet du lézard je coupe le volubilis blanc et le pique à ton oreille l’orage monte soudain d’autres yeux pâlissent il faut sculpter de nouveau totems

Cassiopée ou l’envers du rien n°02, septembre 1983

dimanche 13 septembre 2009

Dernier modèle


Le vieillard attendait chaque jour, par tous les temps, assis sur un bloc de marbre qu'il ne sculptait plus. A l'automne il entourait sa gorge d'une écharpe mitée et, dès les premières gelées matinales, s1enfouissait dans une large houppelande noire ; il les ôtait au printemps après avoir taillé sa barbe. L'été il quittait ses chaussures, décrochait son chapeau de paille. Dès l'aube il fixait le lointain du chemin d'argile où personne n'apparaissait. A la tombée de la nuit il rentrait chez lui en claudiquant un peu. On ignorait ce qu'il mangeait, les fruits du verger, certes, mais l'hiver ? on a parlé de rats et de chauves-souris, le voisinage bavardait beaucoup. Chaque fois qu'on le croisait il sortait de la .poche de son pantalon le même carnet rouge écorné, écrivait un ou deux mots puis le rangeait avec précaution. Donc, on racontait qu'il était fou, qu'il avait eu peur de la guerre, qu'on avait massacré sous ses yeux sa femme et ses enfants, rien de sûr. On le surprit une fois, une seule, cueillant des fleurs en pleurant et hochant la tête de contrition. Certains affirment encore qu'il leur parlait en s'excusant : "Je suis obligé, ce n'est pas ma faute, ce n'est pas ma faute".
Un après-midi, à la fin des cerises, il nettoya à grande eau le bloc de marbre, gratta patiemment la fiente des oiseaux apprivoisés, le lustra avec sa manche de chemise. Il ne s'assit pas, s'avança sur le sentier ses deux mains en visière. La chaleur craquelait la glaise, même l'ombre brûlait. Il n'eut pas à patienter longtemps. Une silhouette blanche se distingua à l'horizon flou, vibrant comme une gelée pâle.
Ce furent de longues séances de pose. Plus de trois mois paraît-il. Le jeune homme se tenait debout, nu, presque immobile, tous les matins, sans exception. Sous le soleil sa peau fonçait, la roche blanche reproduisait ses formes parfaites. Il pleuvait aussi, rien ne les troublait. Les commérages se multipliaient. On menaça même d'en référer aux autorités compétentes. Il fut interdit aux plus jeunes de s'avancer jusqu'à la barrière des saules. Il y eut des escapades, des guets secrets. Pour le déjeuner les filles revenaient à la ferme pommettes rougies et bredouillant d'informes explications ; les poules s'égaraient, les vaches paissaient plus loin. On se disputait pour retourner les foins, pour faucher la luzerne. Les garçons aussi ne restèrent pas indifférents ; ils jetèrent d'abord quelques cailloux, des œufs, fleurs de nénuphars, bouses séchées, os de lapins noix vertes, noyaux de pêches mais, parfois, une culotte trop étroite laissait deviner une autre fièvre. On en vit deux, main dans la main, courir en direction du bois.
Le modèle souriait insouciant des fatigues, de l'ankylose ouatée de II heures. Il n'exigeait que rarement un bref entracte, alors il se courbait sur l'abreuvoir s'aspergeant d'eau limpide. Ses muscles longs et saillants luisaient comme une soie. Un dimanche il troubla d'un grand rire en roulades ininterrompues les groupes de fidèles qui, de l'autre côté des vignes, se hâtaient vers la chapelle ; son sexe dressé battait contre son ventre. Le vieillard oeuvrait silencieusement mais une espionne prise de tremblements dut s'aliter et délira durant trois journées et trois nuits. Les plaintes n'aboutirent pas. Un gendarme tomba dans la mare évitant de justesse la noyade, le vélo du facteur crevait régulièrement, une jument mit au monde un poulain difforme qui ne vécut pas, les blés du villageois le plus aigri pourrirent, des fiancés reprirent bagues et serments, enfin le clocher se tut.
Et le sculpteur, les doigts meurtris, les paumes saignantes, achevait ses travaux.
Au premier soir de septembre le vieillard s'appuya sur l'épaule du jeune homme qui souriait toujours, ils disparurent au lointain du chemin d'argile. On défila devant la statue brisée déjà maculée par les volatiles de basse-cour. Près du socle le carnet rouge gisait dans ses cendres, le feu avait épargné quelques pages. On pouvait lire, comme une liste régulière et tracée d'une écriture fine, sur chaque interligne :
échec
échec
échec
échec
échec
échec


Le temps de la nouvelle, mai 1983

lundi 20 avril 2009

Paysage clos, Camphre 1&3, Mars amer




PAYSAGE CLOS

aux noirs s'unit la palissade (des paumes ombrèrent mon front) un clair matin - le relief de ta fuite -dispose ses embruns en jeux de lattes de fines enclumes (de la paille au soufre) la nuit estompait l'ordre carcéral le rite figé des fétiches des fleurs fanées attendre - premiers alcools - qu'un ressort inventé délasse les phalanges ratures mes flaques et navires perpétuées sur le tain du buvard parfois soumises aux circuits nets de la règle venin sur le destin réel du délire portrait strophe épure introduisent midi une faim illégale marée des cendres traces d'un doigt encré enveloppe- ouverte la parole sur langue asséchée son message indécis j'évalue ton miroir (des cuisses s'ouvrent sur plis obscurs triangle isocèle) et m'y cogne - un dandy aurait rasé sa joue - nul nuage sur l'érection des planches le chat n'y griffe plus son rut rien vomi rien poli titre biffé ton odeur coule du lit vallée de l'énigme j'épingle un cheveu le lisse l'enduis do salive le couche sur la page stérile je cherche une lagune ouverte



CAMPHRE 1

Ce sexe dans ma main le dur et l'élastique ton sommeil tremble je me colle au plafond te couvre de terre et t'enrhume ai bu ta potion d'orgeat (tapioca sucré) tu viens et vas l'heure est z il n'y a plus d'affiches dans la ville



CAMPHRE 3

tant pis (tant mieux) j'accepte je- t'applaudis je suis ton bizuth ta schiava veux bien l'implore te souffle ma Meilleure haleine je m'assouplis et ne circoncis m’accroupis sur ta bouche ton sexe huilé on imitant le dindon (qui a ses couilles sur le front) m'épile toute la peau pour te donner l'enfance te cherche le lait à petites succions à petites morsures collecte cuirs clous échardes légumes et objets oblongs je tresse ma cage creuse nia tombe ne couronne d'épines tu no touches l'épaule le temps presse toujours je prends ma douche froide



MARS AMER

doigts phlegmoneux je creuse le gel la terre de jonquilles la mémoire en chevrons méduse d'un océan laiteux des garçons se disputent leur ventre d'oiseaux blancs ils pleurent dans l'alcool une joie détroussée une ombre dégueulée courbe les rayons fraudeurs plus de futur conjugué la taupe est une sœur au destin régulier


Décharge n°16, juillet 1983