dimanche 23 août 2009

Entre mordre et lécher



Les voyous rôdent, leurs aisselles fleurent le cambouis, le sapin des hautes montagnes. Ils braillent «enculé» pour l'insulte, commissures amères. Un adolescent, le regard luminaire, espère le crachat mentholé, renifle toutes les nuits le sillage de leur chef, crocs cariés, caricature virile. Le chef dégrafe sa braguette, cale sans sa main crevassée un membre germanique et pisse sur l'hiver pour singer son haleine. L'adolescent épie, salive un peu, entre ses dents oscille une brindille d'épineux, segment moisi, décomposé. Il lèche dans ses rêves le bouton de métal (une tête d'Apache), la fermeture-éclair.
A la saison des serpents (école des pelouses, de la pêche aux têtards), nu sous le soleil, il enfonce son sexe dans la boursouflure des taupes, jambes écartelées, criant sans écho : «je suis une gazelle !»



J'ai cassé mes dents sur ton bec de colombe, coula une résine de jade.



Il s'accroupit sur des forêts de betteraves, protège les doryphores, ces zèbres trafiqués (travaux obscurs des réducteurs). Les escargots maudissent les végétariens, ils bouillent dans leur coquille. Les poux s'accomplissent partout, infatigables. Il a vu des roses transparentes, fluides, bouffées par des mandibules méthodiques.
Je frottais mon visage contre les cals de tes mains terreuses. Je suçais ta moustache trempée de soupe. Tu t'es couché dans le sillon frais, les vers ne lésinaient pas. Un rouge-gorge étouffait dans ma bouche. Le sécateur, un parfum de rouille et de vigne, trancha ma langue que le corbeau le plus noir emporta.
La voisine jumelle, baissée, pissait en fredonnant : «II ne m'embrassera plus ! » J'avais trop à m'occuper de moi. J'attendis, une année sérieuse et vaine, qu'entre mes mâchoires le printemps des mots s'organisât. Seules les fougères caressaient. Je conçus la masturbation.



S'encage le fleuriste en rêvant d'aquarium, prépare des repas de renoncules, de chardons tendres, de sépales d'iris noirs, ceux safran des glaïeuls sépia, des boissons arc-en-ciel, nénuphars piles, pollen écrasé. Il plonge ses mains dans le bocal aux sangsues, imagine des petits miracles, une lévitation subreptice.



Je voulais raconter des coups de couteaux dans le cœur, la cervelle, des vomissures, l'action lente et sûre des tisons, l'onctuosité des viscères, les coquilles molles des couilles, la rougeur des oreilles entre crocus et pain grillé, le sable collé dans les articulations, la sueur et les poils. Je datais, confiais des anecdotes élimant les fantasmes pour pouvoir poursuivre (toujours de bonnes raisons et s'abriter). L'idée devient chétive, l'oralité bougonne, la nudité fictive... toiles peintes au soleil, ciré contre la pluie, épingles sur le vent.


Passagère(s) n°4, Bordeaux 1985

L'entonnoir





LPDA n°52, août 1985

dimanche 16 août 2009

Grand changement de l'hiver au printemps



J'aime les porcs
Je n'aime pas les papes
... le blasphème
... le cirque
... la peau
...les abattoirs
... l'été
... les mères des surdoués
... les silex
... la chasse
... Torcello
... les bons points (podiums)
... les bus
... les doux draps
... (T) lui
... la corrida
... le sexe de T
... les uniformes
... les sopranos dramatiques
... les animateurs patentés
... la bouse
... le pouvoir (tout genre)
...midi
... le vermicelle (à la tomate)
... René Crevel
... la viande bleue
... attendre
... les bizutages
... La Dame aux Camélias
... Guignol
... le très cuit
... les sous-entendus
... la scène(coulisses)
... la pure virtuosité
... l'azur
... le luxe
... Mémé Texille
... les castes
... la pénombre
... l'imposture intellectuelle
... les Sonnets de Pétrarque (Liszt)
... le porte à porte
... jouir
... vendre ma soupe
... le café de minuit
... ma grasse adolescence
...La Ricotta (Pasolini)
... «Tais-toi et mange !»
... les mots
... Le Petit prince
... les feux d'artifice
... les nécrologies

Comme un terrier dans l’igloo, n°37, février 2002

Les cons

 

LPDA n°41, juin 1986

dimanche 9 août 2009

2è Rencontres des Amis de Michel Valprémy

"Robin", Villegouge, 2 août 2009

Les deuxièmes rencontres des Amis de Michel Valprémy se sont déroulées à "Robin" (33) le 2 août 2009, sous un beau soleil et en présence de nombreux invités, tout heureux de se retrouver en cette circonstance.
Avant toute chose il convient de remercier chaleureusement Claude Martin pour son hospitalité et pour l'organisation parfaite de cette journée, laquelle nous a fourni l'occasion d'évoquer collectivement Michel, de nous remémorer sa vie et son oeuvre avec beaucoup d'émotion, de tristesse et de joie mêlées.
Les séances de lecture nous ont permis de constater une nouvelle fois combien les écrits de Michel, à la fois poétiques, drôles et sulfureux, sont aussi bien faits pour transpercer un auditoire d'adultes, jeunes et moins jeunes...

Le travail éditorial de l'Association a bien sûr été évoqué, notamment en la présence de Claude Martin, Pierre Valprémy, François Huglo, Sylvie Nève, Françoise Favretto, moi-même...
Les projets principaux émanant des précédentes rencontres ont fait l'objet d'un premier bilan, et d'autres pistes ont même été tracées.

1) François Huglo continue de travailler au volume dénommé "Agrafes" qui devra rassembler les textes édités en plaquettes ou ayant fait l'objet de recueils "agrafés" du vivant de Michel. La liste initiale (non définitive) faisait état des textes suivants : : Emblèmes évidés, La boue, Travaux obscurs, Paysages clos, L'ingénu kaolin, La reine des guêpes, Un cri dans le couloir, Cocagne, Le distinguo, Le jeune homme la méduse, Il pleut l'ange, Chichi le chevalier trempé, 7 impasse Gigogne, Nuit bleu nuit, Miettes en sauce, Amoroso, Rouge pendu, Doloroso, L'homme aux gants, Artabax, Clowns croque-morts, Poèmes ingambes... L'Atelier de l'Agneau se chargerait a priori d'éditer et de diffuser cet ouvrage (un ou deux volumes ? cela reste à décider).

2) D'autres oeuvres restent disponibles chez les éditeurs, c'est le cas de : Rose Raoul, L'oeil du guetteur, Grigri des cendres, Mailles mémoire, Albumville, Cibles cribles, Tout le monde passe devant les vitrines, Manips, etc. Il n'y a plus qu'à encourager voire stimuler ces derniers afin qu'ils rééditent et/ou diffusent à nouveau un maximum d'ouvrages de Michel Valprémy. Il convient cependant de faire un "état des lieux" des éditeurs impliqués afin de s'assurer qu'aucun livre de Michel ne soit promis à l'abandon en cas de disparition, faillite, cessation d'activité des susdits (sait-on jamais...). Dans ce cas, il suffirait de rallonger quelque peu le sommaire du volume "Agrafes" en préparation et d'y intégrer les oeuvres "menacées"...

3) En ce qui concerne les textes brefs, voire très brefs, publiés en revue - spécialement au cours des années 80-90, nous avons décidé de poursuivre leur "mise en ligne" sur ce blog-ci (Michel Valprémy, écrivain), grâce notamment au recencement plus-qu'exhaustif effectué par Jacques Valprémy, et étant donné également qu'une bonne partie des textes ultra-courts comme des graphismes avaient été publiés à l'époque par mes soins dans La Poire d'Angoisse et/ou dans le volume "Morceaux choisis" des Contemporains Favoris. Dans moins d'une année, au rythme d'une publication de deux ou trois textes et/ou dessins par semaine, une partie de l'oeuvre de Michel sera ainsi rassemblée et présentée gratuitement au public. Il sera alors possible d'envisager une véritable réédition sur papier, une compilation exhaustive des textes courts de Michel Valprémy. Puisqu'un projet similaire avait finalement été réalisé du vivant de Michel avec les "Morceaux choisis" précédemment cités, j'ai proposé que Les Contemporains Favoris "reprennent du service" et se chargent de réaliser une sorte de "Morceaux choisis" bis, en réalité deux ou trois fois plus consistant que le premier. Affaire à suivre donc...




4) Enfin a été évoqué - notamment par Claude Martin - le "problème" du Journal de Michel. Plusieurs interrogations ont émergé à propos de cet immense journal intime qui couvre plusieurs décennies, et dans lequel Michel a consigné, non seulement des "propos pour lui-même" comme il est de règle dans un Journal, mais aussi des indications littéraires de la plus grande importance concernant sa propre oeuvre et du plus grand intérêt concernant ses lectures, ses relations avec les écrivains contemporains, sa conception de la littérature... Pour toutes ces raisons il semblait légitime de soumettre l'idée d'une publication du Journal de Michel Valprémy. Etant donné qu'une partie (certes infime, au regard du Tout) de ce Journal a été recopiée, dactylographiée, et sans doute "expurgée" (?) par son propre auteur, on peut penser que Michel envisageait, supputait sa publication posthume... D'autre part cette publication semble souhaitée également, unanimement, par les membres de l'Association. De sorte que la question d'une mise en oeuvre technique, humaine, financière, etc. de leur retranscription a été très sérieusement évoquée. Quiconque a vu de ses propres yeux un manuscrit de Michel imagine à quel point la retranscription de son Journal représente un problème de taille, aussi immense que le Journal lui-même, autant dire une vraie gageure !
Enfin, tout ce qui vient d'être dit à propos du Journal peut être appliqué à la Correspondance de Michel : même intérêt, mêmes doutes (que faut-il sélectionner, selon quels critères ? etc.), mêmes difficultés...

Ci-dessous, quelques photos de la journée du 2 août.


Lectrice : Marie Delvigne

Sylvie Nève lisant

Christian Rousseau

François Huglo lit

Agapes...