mardi 27 octobre 2009

Ce supplice affreux

Michel Valprémy


..."ce supplice affreux qui commence si bien et finit si mal", oui, on en sourit, on le chante aussi dans Mârouf, savetier du Caire (Rabaud)... Et, tous ces trucs noirs et blancs, ces images: les noyés, les corps crevés, perforés, la "Longue pièce de bois aiguisée par un bout" (Littré) qui les perce, cette viande livrée aux charognards invisibles, invisibles dans le noir, un noir très noir, un noir presque absolu, lent à venir, qui s'installe et qui reste, malgré l'eau et l'éponge... Les corps crevés, perforés, réplique humaine de 1'embrochage des volailles, du sanglier, du cochon de lait; l'horreur, toujours; parfois, entre deux giclées de foutre " un sang sombre formait une mare au pied du pal." (Apollinaire), le rouge dissous dans le noir...
... Tous ces machins, tout petits, très peu cruels, enfoncés sans blesser, avec l'alibi du grenier, — ça va ?, — ça va !, — rigole pas, ça fait mal!, tous ces machins à s'asseoir dessus, du thermomètre au "butoir" qui donne "jusqu'au cou des coups de plus en plus costauds" (Cliff)...
... Mais voici l'histoire, presque vraie, pas tout à fait fausse, l'histoire du sucre d'orge pourléché, longtemps sucé, aminci, effilé comme l'aiguille ou le passe-laine, le bonbon qui, par la faute du coude de l'enfant jaloux,- un peu pincé, troue le gosier ; le goût du sang et du miel, la douleur sucrée...

LPDA n°66-67, décembre 1985

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