mardi 14 juillet 2009

Jeux de mains



1 - Elle refuse de s'ouvrir. La paille est trop courte, la pierre trop dure.
Elle préfère que, lents et sûrs, les ongles crèvent sa paume, la tétanise pour toujours.

2 - Elles le font exprès. Elles se soudent, coupe ambrée. Elles savent déjà que le soleil les brûlera. Elles se soudent, font semblant d'être plus .résistantes que l'amiante. Elles cajolent l'anneau, le roulent et le bercent. Elles doivent lancer l'anneau, c'est inévitable. Elles n'ignorent pas qu'elles fondront sous les plis de la robe avant de l'avoir rattrapé.

3 - Elle échappe un mouchoir sur un divan de velours, se dissimule sous la dentelle princière d'une mitaine, sous un gant de cuir havane ou rouge vénitien (une seule fois cobalt). Elle effleure la corolle des digitales, évite de se compromettre avec le pollen. Elle ne touche jamais l'oreille ou la narine. Mais, quand la dernière nuit d'Août inverse toutes les promesses, quand sa blancheur cireuse offense la lune elle plonge dans la viande saignante, le purin des coqs.

4 - Je serre les cuisses, elle est ma prisonnière. Tout l'art consiste alors à ne plus lâcher prise. Elle tentait 1'aventure depuis plusieurs jours, gnome ou anguille. L'audace ophidienne d'une ceinture, le brouillamini des cotons, la fidélité d'un élastique malmenaient sa percée, provoquaient la retraite, installaient les quartiers d'hiver.

La revue 22, hiver 1985

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