Le quartier quadrillé. Il fouille l'ordure, collecte grains
de sable et perles vives. Sous la première pelure, il cherche la virgule de
l'ongle, corne jaunie des fumeurs, poudre fuchsia du vernis. La piste est
lisible à l'œil nu, sans loupe, sans pendule: les croqueurs sont venus groupés.
Des suspects il surveille le chevauchement des syllabes. Mais, soudain, un
poing imprévu écrase la pulpe déjà blette. Le limier ne joue pas au plus fin.
D'autres légendes, foucades et drames sérieux, gonflent, désobéissent:
Une duègne pourfend le cœur d'un fiancé fou — les ancolies
flétrissent.
Le salon ruisselle, sent le moisi, le sel mouillé — les
larmes des servantes sont coupables.
Un édredon étouffe le guerrier vaincu — la plume éclabousse
l'air, l'alourdit.
En côte, la dynamo pendouille, claque sur les rayons — des
yeux moqueurs clignotent dans les arbres; on dira que le jus sur nos poignets
est bave d'escargot.
L'enquête est exemplaire. Des listes longues jusqu'à demain
corrigent les pertes de mémoire, quelques outrances de la geste. Dans le livre,
l'histoire cicatrise; ce seront fibres et trémas, des ratures comme des
barques, l'indécrottable pustule.
Une faillite: l'oiseau manque le chat au recel de l'infime.
Sans dommage apparent, la chambre frissonne, s'étrécit. Un vent sopraniste
mange les fenêtres. Les visages fameux désertent, la flamme fraude, l'encre
grasseyé. Les nobles plafonds l'ennuient, les miroirs, les vitrines. Au pied
d'un vase, l'artiste s'entortille. Le tapis ment jusqu'à la corde. Du loisir,
alors, il rêve l'ascèse. C'est, sans erreur, la mélancolie.
Foldaan n°8, "Ligne de nuit", décembre 1987
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